Qu’est-ce que veut dire le projet de loi 94 pour l’éducation au Québec?
L’article suivant constitue un survol rapide de l’article « Usage exclusif du français à l’école : Une entrave majeure à la réussite, selon la recherche » écrit par Corina Borri-Anadon et Josée Charrette ainsi que de l’audition sur le projet de loi n° 94 présentée par Josée Charrette, Julie Larochelle-Audet, Corina Borri-Anadon, Sivane Hirsch et Hana Zayani.
Par Olivier Millette
Étudiant au baccalauréat en psychologie
Déposé le 20 mars dernier, le projet de loi 94 tente de renforcer la laïcité dans le réseau de l’éducation. Pour y arriver, ce projet de loi impose un usage exclusif du français dans les échanges du personnel employé scolaire ainsi qu’une restriction d’accommodements étudiants pour des motifs religieux. Du même coup, il impose aux étudiants « une conduite exempte de toute forme d’intimidation ou de violence, motivée notamment par le racisme, l’orientation sexuelle, l’identité sexuelle ou de genre, l’homophobie, un handicap ou une caractéristique physique. »
Cependant, des membres de l’Équipe Ideé (Inclusion et diversité ethnoculturelle en éducation) tentent de signaler les contrecoups inattendus du projet de loi 94 en prenant appui sur la masse de données scientifiques accumulée auprès du réseau scolaire québécois depuis les 35 dernières années. Les membres mentionnent que certains des articles proposés constituent « une entrave majeure à la réussite scolaire », et ce, dans l’ensemble des dimensions de l’éducation.
Plus précisément, Ideé dénonce la manière dont le ministre de l’Éducation tente d’atteindre la laïcisation de l’éducation québécoise. D’ailleurs, l’Équipe Ideé relate que les articles ajoutés sont incohérents avec les objectifs de ce même projet (p. ex. la francisation de l’éducation) et les missions premières de l’éducation (instruire, socialiser et qualifier).
Une entrave majeure à la socialisation
Comme le Québec s’identifie comme une société pluraliste, c’est-à-dire une société qui respecte la cohabitation de la diversité socioculturelle, ledit projet de loi contrevient à ceci en limitant la diversité tant linguistique que religieuse.
Cette limitation de diversité transforme le milieu éducatif qui autrefois favorisait l’apprentissage du vivre-ensemble en un lieu de conformité et de coercition. Le projet de loi 94 se contredit donc en mentionnant vouloir former des « citoyens responsables et pleinement engagés dans la vie démocratique, sociale, communautaire, économique et culturelle de l’État du Québec », alors qu’assurer une présence de la diversité religieuse et linguistique permettrait de soutenir une socialisation plus adaptée à notre société pluraliste.
Selon la recherche, cette limitation d’expression de la diversité socioculturelle augmente la discrimination, la suspicion et nourrit les préjugés envers les minorités religieuses dans le milieu scolaire. À leur tour, ces conditions de marginalisation affecteraient la réussite éducative, l’engagement scolaire et le bien-être psychologique des victimes.
Une entrave majeure à l’éducation
Alors que le projet de loi dit vouloir « mobiliser l’ensemble de la communauté éducative autour de la réussite de l’élève […] propice au développement du plein potentiel de l’élève », l’Équipe Ideé affirme que l’interdiction de recourir à d’autres langues que le français « prive d’un appui pédagogique essentiel et mine leur développement cognitif, affectif et identitaire. »
De plus, selon la recherche, le recours à d’autres langues que le français permet de soutenir les apprentissages alors que l’imposition du français diminue le sentiment d’appartenance à la société québécoise et la motivation à apprendre le français. Dès lors, l’imposition du projet de loi est activement contreproductive selon l’état des connaissances scientifiques actuelles.
L’équipe déplore aussi l’attention démesurée que le gouvernement accorde à la religion comme seul motif d’interdiction d’accommodements raisonnables. Par exemple, couvrir le visage est permis pour des motifs médicaux alors que le port du voile ne l’est pas.
À l’avenir
Ideé implore que le remaniement de la Loi à l’instruction publique se fasse plus conformément aux valeurs centrales de l’éducation québécoise comme l’égalité des chances et le droit à l’éducation pour toutes et tous. L’équipe demande au comité de la culture et de l’éducation de considérer les portées discriminatoires possibles de tout projet de loi futur.
Somme toute, le projet de loi 94 mettrait en péril l’égalité des chances des élèves tout en renforçant les fractures sociales selon les présentatrices d’Ideé.
Références
Borri-Anadon, C. et Charette, J. (2025, 18 avril). Usage exclusif du français à l’école : Une entrave majeure à la réussite, selon la recherche. LaPresse. https://www.lapresse.ca/dialogue/opinions/2025-04-18/usage-exclusif-du-francais-a-l-ecole/une-entrave-majeure-a-la-reussite-selon-la-recherche.php
Larochelle-Audet, J., Borri-Anadon, C., Hirsch, S., Charette, J. et Zayani, H. (2025, 24 avril). Audition sur le projet de loi n° 94, Loi visant notamment à renforcer la laïcité dans le réseau de l’éducation et modifiant diverses dispositions législatives [vidéo]. Assemblée nationale du Québec (archives parlementaires). https://www.assnat.qc.ca/fr/video-audio/archives-parlementaires/travaux-commissions/AudioVideo-108675.html
Éditeur officiel du Québec. (2025, 20 mars). Projet de loi n° 94 : loi visant notamment à renforcer la laïcité dans le réseau de l’éducation et modifiant diverses dispositions législatives. https://www.assnat.qc.ca/fr/travaux-parlementaires/projets-loi/projet-loi-94-43-1.html